samedi 24 décembre 2011

De poisson à foison


Une fois n'est pas coutume, je vais écrire à propos de quelque chose qui ne s'est pas passé le siècle dernier, mais la semaine dernière. Espérons que ça devienne une bonne habitude.

Ca faisait un petit moment que je voulais aller visiter le marché aux poissons de Tsukiji. Recommandation absolue de tous les guides de voyage, c'est là que débarquent chaque matin et par camions entiers les tonnes de poisson et autres fruits de mer qui alimentent les poissonneries et les restaurants de sushi de Tokyo. Les pêcheurs étant des gens de bon matin, les préparatifs du marché commentent à 1h du mat' pour une ouverture programmée vers 5h, soit bien avant le premier métro. J'avais pour plan de sortir en soirée à Roppongi puis d'aller directement à Tsukiji pour la vente à la criée, histoire de manger du poisson cru en chemise et d'avoir du thon rouge au petit déjeuner. Cela tient toujours, mais ça n'en est que remis à plus tard - ça pourrait être hilarant - car j'ai préféré sécher mon samedi matin pour y aller à la fraîche sur l'invitation de mes sempaï.

Quand je dis "à la fraîche", tout est relatif. C'est vers 9h qu'on s'est pointés au marché (soit 3h après les enchères des monstres de plusieurs quintaux), à l'heure où les fiers pêcheurs prenaient leur dîner dans les échoppes à râmen alentours. J'avais prévu la visite de longue date avec M. Tsumura, ce qui lui a permis d'inviter sa femme, moi d'inviter ma copine, et au couple d'organiser une rencontre avec un groupe d'autres sempaï plus âgés. Il y avait parmi eux un homme de presque cinquante ans qui en semblait trente, bottes en plastique aux pieds et coupe-vent sur le dos, qui connaissait TOUT sur les poissons. Nous emmenant à travers les allées étroites de la halle aux poissons un grand sourire aux lèvres, lui qui avait déjà une dégaine de maître-pêcheur, il semblait nager dans son élément. Et quel élément !


Si les zones à l'extérieur dédiées à la vente aux particuliers étaient propices à la flânerie, le quartier ayant un charme tranquille avec ses petites ruelles, ses petites échoppes et sa foule du week-end, la grande halle plutôt orientée professionnels fait moins touriste-friendly. Partout filent de petits bolides qui manquent de vous renverser si vous ne faites pas attention, leur design d'auto-tamponneuse ayant sans doute été adopté dans le seul but de tuer les gaijin sur le coup. Pour mieux les désosser et les vendre comme steaks de thon dans les étals alentours. Si les manutentionnaires faisaient bien comprendre qu'ils bossaient et qu'il ne fallait pas traîner dans leurs pattes - rappelant les braves charretiers de Lutèce - les vendeurs étaient bien plus patient et sympathiques bien qu'on ne faisait que photographier sans rien acheter. Visite guidée en photos du plus grand marché aux poissons du monde.





La découpe du thon surgelé, à la scie électrique. Meilleurs que des tailleurs de pierre.

La tête, c'est ce qu'il y a de meilleur. Paraît-il.

Le fameux fugu, aussi appelé poisson-globe

De la découpe à la barquette


Tout est bon dans le thon !

Du poulpe à la louche


Même Hello Kitty veut buter des gaijin avec son bolide

Étals bondés dans le marché extérieur


Voir toutes ces merveilles nous a donné faim. Bien évidemment, c'est vers un restaurant de sushi ultra-bondé qu'on s'est dirigés pour goûter à la prise du jour. Et ça ne m'étonnerait pas que les poissons vus en vente quelques heures auparavant se soient retrouvés dans nos assiettes !

Miam.

Sur proposition du spécialiste des poissons, j'ai tenté le fugu. Oui, le fugu, alias poisson-globe, le poisson toxique qui t'expédie très rapidement à la morgue s'il n'est pas correctement préparé. Vu que je n'en suis pas mort, je suppose que le chef n'avait pas trouvé sa licence dans une pochette-surprise - la vente du fugu est soumis à régulation. Reste que ce n'était pas le meilleur sushi de ma vie, le poisson étant fondant mais n'ayant pas trop de goût. Ca ne vaut pas le bon vieux thon rouge à l'extinction duquel je participe malheureusement.

Portrait d'un assassin

Etant assis entre Emma et Yoko - la femme de M. Tsumura -, j'ai pu piquer dans le plateau de la première et en apprendre de la seconde. Elle m'a notamment montré comment plier l'étui en papier des baguettes pour en faire un repose-baguette en origami, de quoi briller en société. Elle m'a également présenté son carnet personnel où elle recueille les tampons des lieux célèbres où elle a été, que ce soit une gare, un aéroport ou bien les pavillons de l'Exposition universelle de Shanghaï. On peut vraiment trouver ce genre d'énorme tampon dans tous les endroits touristiques à condition de bien savoir chercher, ce qui me fait penser au trafic de médailles-souvenir en France, sauf qu'ici ça fait bien moins ringard et ça a des allures de chasse au trésor. Je pense que je vais m'y mettre aussi, ça pourrait être un bon moyen de recueillir des souvenirs.

Un grand merci aux sempaï de nous avoir fait visiter cet endroit et de nous avoir offert le repas. En sortant, l'après-midi hivernal de Tokyo nous ouvrait ses bras pour une petite balade au soleil...


samedi 17 décembre 2011

L'automne à la japonaise - Acte 2 : Kuratake-yama !

De l'aventure, du suspense, des paysages magnifiques et un Mont Fuji, voilà ce que je vous propose dans ce second récit de l'automne - alias comment un site trop vieillot pour être honnête nous a fourni une belle randonnée aux couleurs du momiji.

23 novembre, fête du Travail au Japon, jour férié inattendu qui fait bien plaisir quand on est censé avoir du boulot. Au lieu de profiter de l'automne de la flemme, me voilà parti en une belle équipée pour le lointain mont Kuratake, situé dans la préfecture voisine de Yamanashi et inconnu de la totalité des Japonais. Comment suis-je tombé en possession d'un plan pareil ? Peu après après la balade du Mont Takao, Philipp l'Allemand a déniché un vieux site à l'esthétique dégueulasse tenu par un groupes d'alpinistes occidentaux à propos de randonnées dans les environs de Tokyo. En ayant trouvé une sympatoche et à la portée du premier venu, j'ai imprimé une carte topographique où le parcours était souligné au gros stabilo rose, j'ai fait un bel évènement Facebook pour rameuter du monde et SQUADALA nous sommes partis !

23 novembre donc, frais et dispos et cette fois en avance au rendez-vous, on rassemble tout le monde avant de faire un premier changement à Shinjuku pour sortir de Tokyo, puis un second à Takao pour s'enfoncer plus loin encore dans les montagnes. A bord, une équipe internationale constituée d'un Espagnol, un Allemand, une Danoise, un Hollandais, une Taiwanaise, deux Japonais et moi-même, tous prêts à en découdre. Et ce n'est pas arrivées devant la montagne et ses 700 mètres de dénivelé qu'on s'est découragés, loin de là.

Mont Kuratake droit devant !


Des futurs paquets d'Uncle Ben's





Ouaip, attention aux ours. On les a bien cherchés pourtant, mais aucun n'a daigné se montrer pour faire un remake de Danse avec les Loups en mode sanglant. C'est presque la même chose pour les touristes : on n'en a pas trouvé un seul, mais on n'en a pas cherché non plus. Il faut dire que ce coin était plutôt reculé, loin de tous les guides touristiques, et le mont Takao aspire une bonne partie des voyageurs. Tout ce qu'on a rencontré, c'est un une quantité assez faramineuse de Japonais du 3e âge assez en forme pour assurer un marathon et quelques jeunes qui s'étaient égarés par là. La fortune leur a joué un bon sort, car l'ambiance était purement magique en ces lieux. Trêve de bavardage, voilà une petite galerie photo pour vous retranscrire au mieux l'atmosphère de la forêt.


Il est où le Dieu Cerf ?

Ce panneau indique que l'eau de source de la montagne est potable et qu'il ne faut pas la polluer, ce qui m'a vraiment étonné car je ne m'attendais pas à trouver de l'eau buvable en l'état au Japon. La France est loin.




Et puis ce fut le drame. On s'est trouvés à une sorte de croisement avec un petit sentier s'enfonçant à flanc de montagne, et la carte mentionnant un crochet et une dénivellation à peu près constante (ou ma mauvaise foi étant tout à fait apparente), on s'est laissés tenter par ce chemin de traverse. C'est alors qu'on est entrés dans un monde de pins et de rais de lumière très joli, mais sans véritable chemin.


Vu qu'on a fini par se douter que quelque chose n'allait pas, on a juste grimpé le flanc de la montagne jusqu'à retrouver le chemin des crêtes qu'on était censés emprunter. Mais c'est devenu hilarant quand on a déboulé de nulle part, suants et haletants, devant un groupe de Japonaises plus soixantenaires que cinquantenaires qui ont juste demandé calmement "Vous vous êtes trompés de chemin ?". Yes captain'.

La grimpette freestyle en question

Après ce fâcheux épisode et la pause qui s'est imposée, il ne nous restait plus beaucoup de chemin avant le sommet. Le problème, c'est que ce chemin ne faisait pas dans la dentelle et que sa pente a tué la moitié de l'équipée. Mais plus grand est l'effort, plus belle est la récompense : nous voici on the top of the mountain !

Mont Kuratake - 990m

La vallée d'où on est montés.

Si on a retrouvé nos Japonaises cinquantenaires mi-rigolardes mi-soulagées de nous voir arrivés jusqu'ici, on a aussi retrouvé un brave compère qui ne se montre pas si souvent.

Coucou Fuji !

C'est assez dur d'exprimer la fascination que provoque cette montagne. Sa forme parfaite, le décalage de hauteur entre Fuji et les autres monts, et aussi son caractère de montagne solitaire (ce qui ne se voit pas bien ici, notons à tout hasard que le Fuji était bien loin de nous), tout ça se mêle pour lui donner un charme tout à fait particulier.


Ce n'est pas tout, mais il nous fallait redescendre à temps pour ne pas se faire surprendre par la nuit, qui tombe très tôt et très vite. Prenant un autre chemin des crêtes pour revenir à la petite ville, on a pu avoir une autre explosion de momiji en pleine figure. Pour notre plus grand plaisir.


Adret et momiji à droite, ubac et conifères à gauche. Le clash des versants.

Petite pause dans une clairière à la Lothlorien

De retour dans la vallée, entourés des montagnes aux formes asiatiques au possible. Avec une pyramide en bonus.

On est revenus pile-poil à la gare à la tombée de la nuit, mais on venait de louper le train. Mais ce n'est pas plus mal, car on a pu se payer 45 minutes dans un petit local d'attente ressemblant trait pour trait à un gîte canadien en rondins de bois, bien occupés à finir les snacks et biscuits qui nous restaient ainsi qu'à piller les canettes de café du distributeur automatique. Cela ne nous a pas empêchés de comater convenablement une fois montés dans le wagon qui nous a doucement ramenés vers la capitale. Prochaine sortie randonnée : on se tape l'Everest !

*BONUS : Le mont Fuji depuis Tokyo*
(j'ai enfin réussi à le voir cet enfoiré, c'était mission impossible à la fin de l'été)



mercredi 7 décembre 2011

Au Japon, mangez comme les Japonais


Je suis étonné de ne pas avoir écrit cet article plus tôt. Voyez-vous, j'ai mis un brin de temps à m'habituer à la nourriture du Soleil Levant et à prendre mes marques dans les magasins du coin. Certains dans le dorm ne s'y sont toujours pas faits et ne le seront peut-être jamais. Sortez la bonne grosse charcute, le pain de campagne, le camembert bien fondant et le bon pinard car vous ne verrez rien de tel dans les étalages japonais et cet article va vous donner faim.

Le problème auquel je me suis confronté en arrivant n'a pas tant été de manger des produits auxquels je n'étais pas habitué que de ne pas trouver ce que je mangeais d'habitude. J'avais l'impression d'être perdu dans un océan d'inutile dans la supérette du coin, des rayons entiers étant consacrés à divers types de tofu et de sauce soja dont je serais incapable de sentir la différence, alors qu'il n'y a pas une boîte de lasagnes surgelées ni une conserve de petits pois en vue. Ce qui m'a le plus manqué reste les légumes : moi qui étais un inconditionnel des belles salades, des tomates gorgées de soleil et des courgettes aux saveurs du Sud, j'ai tout plaqué. D'une part parce que les légumes occidentaux sont rares, d'autre part parce que les prix sont prohibitifs.

Le plus jeune milliardaire du Japon

C'est un lieu commun que de dire que la vie est chère au Japon en général et à Tokyo en particulier. Le sac de trois pommes coûte 3€ en promotion, la mini-courgette tape dans la même gamme de prix l'unité et la barquette de dix lamelles de viande se balade dans les 5€. Je ne vous parle pas du pot de Nutella ni du sachet de fromage râpé. La vie est chère, donc, mais cela ne vaut que si on fait son baka gaijin.

Dès qu'on s'ouvre un peu à la nourriture locale, tout devient plus accessible : sachet de pousses à 60c, sachet de petites aubergines japonaises nasu autour d'1€50, sac de riz de 5kg à 12€ qui dure une éternité (le mien vient de rendre l'âme après plus de 2 mois de bons services), bouteille de sauce soja autour de 2€ pour parfumer son riz, sachet de pâtes japonaises yakisoba qui fait 3 repas pour moins de 2€, etc... Mais on se heurte à un autre problème qui est celui de la connaissance/expérience : c'est bien beau d'avoir acheté son radis japonais daikon pour 1€50, mais une fois avec le radis dans les bras, on se rend compte qu'on ne sait pas quoi en faire ni à quelle sauce le manger.
Il en est de même pour le riz : une fois arrivé devant l'autocuiseur son paquet sur l'épaule, on s'interroge pendant des heures sur la quantité de riz à incorporer, la proportion d'eau à ajouter, comment il faut laver le riz, et on hésiterait presque à demander aux compères asiatiques tant ça fout la honte d'être un noob complet. Imaginez donc, c'est comme si on demandait à 20 ans comment on cuit des pâtes ! Tant qu'on parle de riz, ne vous imaginez pas qu'on mange du Oncle Ben's ici. La variété est totalement différente, on a des grains de riz plus courts et plus ronds qui, une fois cuits sous pression grâce aux fantastiques autocuiseurs, donnent du riz qui colle et qui peut facilement se manger avec des baguettes. Le tout est de gérer la quantité, car ce qu'on pense être correct pour un repas peut parfois suffire à nourrir la Somalie toute entière.


L'avantage d'habiter dans un quartier étudiant, c'est qu'il y a partout de petits restaurants et autres échoppes où on peut manger pour trois fois rien. Il est même difficile de trouver un menu à plus de 10€ dans le coin ! En général, on peut se faire un bon repas plat principal + riz + soupe miso pour 500Y (5€) et on est calé pour la journée. Profitant de cet heureux coup du sort dans la ville la plus chère du monde, voilà un petit topo des bons plans repas plutôt représentatifs de ce qu'est vraiment la nourriture japonaise d'aujourd'hui :
  • Tendon 天丼 (Tempura-Donburi) :


Comme la plupart des plats finissant par "don", il s'agit de quelque chose sur un bol de riz. Dans le cas présent, il s'agit des tempura, qui sont des sortes de beignets frits de légumes ou, dans le cas général, de longues crevettes et autres fruits de mer. A peu près 500Y pour le set-repas à midi (tendon + soupe miso + petits légumes). Soit un rapport qualité/prix imbattable.
  • Râmen (ラーメン)


Bien connu des amateurs de Naruto, les râmens sont un peu plus chers que les autres délices présentés ici (à peu près entre 600 et 800Y = 6-8€), mais ils les valent grandement. Il s'agit d'une soupe de nouilles chinoises dans un bouillon parfumé à telle ou telle saveur, contenant en outre lamelles de porc et divers légumes. On peut rajouter à sa préférence sauce soja, épices ou gingembre pour rendre le tout encore MEILLEUR ! Les meilleurs enseignes que j'aie trouvées sont Ippûdô (d'où vient cette photo) et Tenkaippin.
  • Udon (うどん)


Autre type de nouilles souvent consommé en soupe et à ne pas confondre avec les râmens. Plutôt que de soupe, parlons de bouillon : de bonne grosses, longues et épaisses nouilles fondantes sont plongées dans un fond d'eau chaude aromatisée à sa préférence avec herbes, gingembre, tôfu, oeuf ou encore tempura. Simple, donc ultra bon marché, on en trouve partout pour nourrir les salarymen affamés qui ne veulent pas se prendre la tête. Le bas de gamme se trouve à 300 yen chez Hanamaru, où j'ai fait mon premier repas japonais à mon arrivée, mais on trouve bien mieux dans les échoppes familiales.
  • Gyûdon (牛丼)


LE bon plan pas cher. Il s'agit de boeuf rissolé accompagné d'oignon grillé sur un bol de riz, le tout avec du gingembre à disposition et de la sauce légèrement sirupeuse si le coeur vous en dit. Ce délice est vendu dans les 12€ rue de l'Opéra alors que ça ne coûte que 400Y -4€- pour le grand format chez Sukiya. Rapide, bon et numéro un en rapport qualité/prix et quantité/satiété, c'est un peu le fast food à la japonaise. Et dieu que j'aime ça.
  • Riz au curry (カレ―ライス)


Allez savoir comment ce plat indien est arrivé dans ce coin du monde, mais il a été repris à la sauce japonaise jusqu'à devenir une part importante de la culture culinaire contemporaine du Japon. Il s'agit donc d'un plat de riz accompagné d'un curry plus ou moins épicé à base de légumes et parfois d'un peu de viande. Mon enseigne de référence reste CocoIchibanya où on peut se régaler pour 500Y mais où il est suicidaire de choisir les currys vraiment épicés.

Si vous voulez vous régaler plus avant, voilà un blog tenu par des camarades étudiants d'échange sillonnant les petites échoppes autour du campus. Et faisant des découvertes de malade mental pour notre plus grand bonheur.

C'est bien beau d'avoir toute une palette de choix plus délicieux les uns que les autres, mais quand on n'a que 45 minutes pour manger entre deux cours, c'est un peu rush. C'est là que le Japon dévoile son génie en transformant ce qui n'est qu'un simple casse-croûte chez nous en une véritable institution : le bentô (弁当).


Au départ simple ration de riz offerte par les seigneurs de guerre pour nourrir leurs troupes, le bentô a traversé les âges pour rester une particularité japonaise. Il y a autant de bentô différents que d'étoiles dans le ciel, le contenu allant de l'uniformité la plus barbante à la sophistication absolue. Le seul point commun à tous ces casse-dalles -et encore !- est de renfermer une quantité plus ou moins importante de riz, le reste consistant en quelques légumes marinées, viande en mode gyûdon ou yakiniku, ou encore des croquettes, des tempura, des sushis, des sashimis, des boulettes, etc... au gré des milliers de combinaisons possibles. Il s'agit donc d'un plateau-repas complet pouvant exprimer l'originalité et la cool-attitude de son hipster de propriétaire par le choix et la disposition des aliments.

Kawaii bentô

Geeky bentô

Freaky bentô

Les bentô peuvent s'acheter partout : il y en a dans tous les combinis ouverts 24h/24 pour combattre le cocktail flemme/fringale de 3h du mat', mais aussi dans l'immensité des échoppes spécialisées qui n'ouvrent que le temps de midi (et qui font les meilleurs), et jusqu'aux vendeurs individuels qui sévissent avec leur stock de bentô et hèlent le chaland. Les bentô tout-préparés se vendent de 200 à 600Y selon le ratio quantité/provenance/qualité, mais son repère de référence reste le casse-dalle à 380Y (3€80). C'est un brin plus cher que le jambon-beurre du Crous, mais aussi 1000 fois meilleur. Si on ne veut pas se contenter des produits industriels et qu'on courre le risque d'être emporté par son estomac au détriment de son portefeuille, on peut aller chez Origin Bentô où on compose soi-même son casse-croûte et on paye en fonction du poids et des produits choisis.

Si on veut vraiment rester maître de sa nourriture (ou si on est fauché), on peut aussi préparer les bentô soi-même et susciter l'admiration de tous ses petits camarades Japonais. Je ne sais pas s'ils sont en extase parce que ce sont des manches, des flemmards de la casserole ou s'ils veulent juste être polis (je vous promets un article sur la tendance qu'ont les Japonais à sur-exprimer leurs émotions), ou encore parce que ça touche un trait culturel profond. Les cantines étant de mémoire peu répandues, c'est traditionnellement la Maman attentionnée qui prépare la boîte-repas de sa progéniture chaque matin. De même, c'est la femme aimante qui compose le bentô de son mari, le temps et le soin passés étant proportionnels à l'affection qu'elle lui porte.

Le bentô de la femme de ta vie


Si on sort manger et qu'on a un peu plus de thunes à dépenser, on peut aussi trouver son bonheur au pays du Sushi Levant.
  • Izakaya (居酒屋)


Je vous en ai parlé à plusieurs reprises, il s'agit du bar japonais. Qu'il ait un mobilier occidental ou juste des tables basses et des coussins pour s'asseoir en tailleur, il ne partage en rien l'ambiance glauco-morbide des PMU, l'atmosphère alcoolique/bobo des brasseries (selon si on se trouve en province ou à Paris) ou encore rosbiffo-sportive des pubs irlandais. C'est vraiment un feeling à part entière où on est coolos, détendax et entre amis. Notons que l'offre des menus est plus développée que dans les bars occidentaux ; à vrai dire, il est possible de se faire un bon petit gueuleton dans l'izakaya du coin pour accompagner sa bière (ou son saké).

Edamame, sorte de petit pois salé qui se marie bien avec la nama-bîru


Yakitori, des brochettes de volaille grillées à point et bien saucées


Cartilage de poulet frit (鶏軟骨のから揚げ), ça croque sous la dent et ça surprend la première fois, mais on s'y fait.


Les fameux Gyôza qui, contrairement à ce qu'on pense généralement, ne sont pas japonais mais chinois. Quoi qu'il en soit, ce sont des raviolis d'un mélange viande hachée/légumes particulièrement délicieux avec de la sauce soja.

Takoyaki, boulettes de farine fourrées au poulpe. Un régal absolu, l'un de mes plats japonais préférés.

Ne croyez pas que la nourriture d'izakaya se limite à cela : ce ne sont que des exemples parmi une infinité de choix possibles. Et sans doute ce que je préfère commander !

  • Restaurant de sushi (寿司屋)
Attention, nous avons deux possibilités majeures ici.

Vous êtes avec des amis et vous n'avez pas envie de dépenser des sommes folles ? Pas de problème, direction le Kaitenzushi (回転寿司), alias le "sushi qui tourne" !


Le principe est hilarant : au milieu de l'îlot autour duquel les clients s'installent, le cuisinier prépare sous vos yeux ébahis toutes sortes de sushis avant de les déposer sur un petit tapis roulant qui fait tout le tour de la table. Le rythme est non-stop : sitôt l'assiette posée, les clients peuvent se l'arracher et se l'avaler en un instant. Les différentes espèces de poisson étant dépecées à tour de rôle, si l'on a une soudaine fringale de thon rouge et qu'aucune portion n'est visible sur le tapis roulant, on peut passer commande et avoir son dû en quelques instants.

Pour ce qui est de la qualité, c'est excellent. Les sushis se vendant autour de 110Y (un euro) les deux bouchées - un peu plus s'il s'agit d'une portion plus grande ou d'un poisson plus cher - on peut se faire un bon petit festin pour 10€. S'ils semblent bien petits, n'oubliez pas que les sushis sont à base de riz et que ça cale vite ! On paye en fonction de la pile de petites assiettes à sushi amassée devant soi, ce qui donne la tentation de refiler la moitié des siennes à son voisin salaryman endormi sous l'effet de l'alcool. Résultat non garanti.

Si on a un peu plus d'argent à dépenser, qu'on est en rendez-vous galant, qu'on veut épater son sempaï (et lui faire payer l'addition) ou qu'on veut tout simplement se faire un grand plaisir, direction le restaurant de sushi à plus haut standing.

*bave*

Les choses se passent de façon plus classique : on s'installe, on commande une quantité fixée de sushis (ou pas si on s'est claqué l'option tabehôdai = à volonté), on attend un peu puis on a l'un des meilleurs trucs au monde sous les yeux. En deux mots : orgasme culinaire.
Bien sûr, les prix suivent. La plâtrée du dessus a tapé dans les 2200 yen (22€), mais ça les valait grandement. Et les quinze méga-bouchées ont calé mon appétit de morfale.

  • Le restaurant de yakiniku (焼肉屋)
Comme écrit plus haut, la viande coûte une fortune. Dans cette situation, se faire un festin de grillades est un plaisir incomparable et un plat remplit cette envie à la perfection : le yakiniku, littéralement "viande grillée" et officiellement barbecue coréen.

*re-bave*

C'est comme un barbecue dans son jardin, mais à l'intérieur d'un restaurant. On s'assoit à une table munie d'un grill en son centre, on commande diverses assiettes de viande crue et quelques légumes et c'est parti pour le banquet ! La viande étant tendre à souhait, c'est un pur délice qui suit tant que l'estomac/le porte-monnaie suit. Pour un bon repas dans un resto standard, il faut compter de 2000 à 3000 Y (20€~30€) selon la quantité engloutie. C'est cher, mais ça le vaut.

Ceci dit, j'ai entendu parler d'un restaurant de yakiniku avec viande à volonté pour seulement 1000 yens, ça me semble tellement incroyable que j'ai absolument envie d'y aller. C'est là qu'une des filles de mon dorm a clairement exprimé son refus, non parce qu'elle n'aime pas ça mais parce que la provenance de la viande semble trop louche pour être honnête. Peut-être n'est-ce que parano de sa part, mais c'est dans ce genre de situation que resurgit le spectre d'une préoccupation que j'ai peu à peu perdu au cours de mon séjour...